Marchés de support open source

Le CNLL révèle la difficulté pour les clients à bénéficier de l'expertise des éditeurs de logiciels libres.

 

L’enquête menée par le CNLL à l’automne 2019 a permis aux entreprises françaises du logiciel libre d’exprimer leur perception des marchés de support open source, et d’émettre des propositions pour améliorer le fonctionnement de ces marchés.

Paris, France, le 28 novembre, 2019 – Le CNLL (Union des Entreprises du Logiciel Libre et du Numérique Ouvert) présente une synthèse de la consultation menée auprès des entreprises du logiciel libre (ENL) sur les grands marchés de support open source (GMSOS) et les appels d’offres afférents. Le but de ce questionnaire était de recueillir le ressenti des entreprises du secteur, qu’elles soient sociétés de service ou éditrices (ou les deux) au sujet de ces marchés, et le cas échéant émettre des propositions afin d’améliorer leur fonctionnement, en amont et en aval des appels d’offres.

L’analyse des réponses obtenues met en évidence une image majoritairement négative de ces marchés auprès des acteurs de la filière du logiciel libre en France, notamment du point de vue de leur efficience pour les clients, de leur capacité à financer les acteurs du développement et de la maintenance de logiciels libres, et de la capacité des acteurs de la filière à participer à ces marchés. L’enquête révèle une réelle fracture entre les éditeurs de logiciel open source, les sociétés de service, et l’accès aux marchés.

Le panel d’entreprises consultées était représentatif de l’écosystème des ENL. En effet, 93 % des entreprises consultées proposent une offre de support Open Source, que ce soit sur un grand nombre de logiciels libres (30%), ou sur un ou plusieurs logiciels libres qu’ils développent (75%).

Des marchés inadaptés aux solutions des éditeurs Open Source

Le métier d’éditeur Open Source n’est globalement pas reconnu par ces marchés. Les solutions d’éditeurs, où se concentre une grande partie de l’innovation, ne sont donc pas présentes ou très mal supportées, ce qui casse la chaîne de valeur. Car si 60 % des éditeurs pensent que leur offre pourrait s’intégrer dans ces marchés, c’est avec une version dégradée de support qui ne peut tirer parti de l’expertise et du support spécifique de leur offre. Une des solutions suggérées évoque l’idée de « plutôt privilégier les partenariats directs avec les éditeurs qu’une relation commerciale avec un intermédiaire avec des surcoûts pour l’acheteur ».

Des marchés qui ne permettent pas un support efficient pour les clients

Il a été relevé notamment que « l’expertise sur les solutions libres est majoritairement détenue par de petites entreprises [alors que les] marchés GMSOS ne sont accessibles qu’aux structures de taille importante », ou encore que « le nombre de logiciels libres existant est trop important pour pouvoir être couvert efficacement par un GMSOS et offrir une expertise sur l’ensemble des softs.»

On constate donc qu’un certain nombre de facteurs sont antinomiques à l’expertise ou la qualité espérée des prestations :

  • La taille de ces marchés limite les réponses à de grandes SSII ou ENL.
  • Leur périmètre, qui concerne plusieurs dizaines voire centaines de composants ou solutions à supporter.
  • Enfin, l’intérêt des titulaires des marchés qui vise essentiellement à capter la valeur et la marge.

Des marchés qui ne contribuent pas et parasitent le développement des logiciels Open Source

Comme le souligne par exemple ce commentaire « le support de façon générale est un bon moyen de financer les logiciels libres. Mais l’ajout d’intermédiaires entre les grands comptes et les sociétés réalisant réellement le travail de maintenance et de développement cœur empêche d’avoir une efficience économique permettant un financement correct des logiciels libres », ces marchés sont jugés par la majorité des répondants comme un moyen de financement inefficace et inapproprié, qui ne rétribue pas les développeurs (et contributeurs) des logiciels, et donc ne contribue pas au développement des logiciels Open Source.

Pire, ces marchés sont jugés comme parasitant le développement des logiciels libres en détournant la valeur du marché : « Les GMOS captent la chaîne de valeur de l’OSS et ne reversent (quasiment) rien aux éditeurs. Ils empêchent souvent les grands comptes de prendre une offre de support chez un éditeur OSS. »

Les préconisations

Diverses solutions et scénarios d’amélioration ont été évoqués. L’ensemble des préconisations reste fondé sur le principe de relations plus étroites entre les clients et les éditeurs de logiciels libre, et sur la mise en place de bonnes règles de gouvernance des groupements lorsque les marchés sont attribués à des consortia.

Plus précisément, les solutions suivantes ont été évoquées :

  • Mettre en place un GMSOS uniquement pour les librairies et logiciels pour lesquels il n’existe pas d’offre de support sérieuse identifiée.
  • Reversement d’une partie de la valeur aux experts des logiciels faisant partie du support: éditeurs, surtout s’ils sont européens ; société d’expertises spécialisés (ex : sur PostgreSQL) ou communautés professionnelles (Eclipse, Document Foundation, Apache, etc.)
  • Référencement direct et sans intermédiaire des éditeurs, quelles que soient leurs taille et celle de leur catalogue de produit. La valeur ajoutée des intermédiaires serait celle de gestionnaire de catalogue, mais ensuite la prestation et le contrat seraient réalisés en direct entre l’éditeur et le grand compte.
  • S’allier, avec une gouvernance équitable et équilibrée, entre acteurs de l’Open Source au sein de la filière afin d’avoir une taille critique et de pouvoir proposer l’ensemble de l’expertise en direct aux grands comptes et être davantage visible auprès d’eux.
  • Favoriser les groupements de petites entreprises expertes et mettre des conditions fortes sur la gouvernance et les capacités de contribution au cœur des outils de la part des entreprises retenues (commiters, preuves de contribution, etc.)

Pour obtenir ce Communiqué de Presse, téléchargez le document (PDF).

Pour lire la synthèse complète de l’enquête, téléchargez le rapport (PDF).